L’énigme des mises à jour logicielles automobiles : pourquoi tant de défaillances ?
Pourquoi les mises à jour logicielles des voitures sont-elles encore si médiocres ?
Un investissement colossal, mais des résultats limités
Malgré des années d’efforts et des milliards d’euros investis, aucune des grandes marques automobiles n’a encore réussi à égaler la capacité de livraison de mises à jour logicielles à distance, souvent appelées mises à jour over-the-air (OTA), de certains nouveaux acteurs du marché. Ces mises à jour, semblables à celles que l’on reçoit sur nos téléphones ou ordinateurs, permettent aux propriétaires de voitures d’améliorer leurs véhicules sans se rendre chez un concessionnaire.
Tesla a été pionnière dans ce domaine, lançant ses premières mises à jour OTA en 2012. Depuis, l’entreprise a su se démarquer en proposant un rythme effréné de mises à jour, en émettant jusqu’à 42 mises à jour en six mois. À l’inverse, la plupart des constructeurs traditionnels n’envoient qu’une ou deux mises à jour par an, illustrant ainsi l’écart croissant entre les entreprises numériques et les acteurs établis.
Un changement de paradigme
Historiquement, les fabricants de voitures ont considéré le logiciel comme un élément périphérique de leurs véhicules. Cependant, pour Tesla et d’autres marques axées sur le numérique, le logiciel est devenu le noyau même de leur modèle économique. Des entreprises telles que Rivian, Lucid et des marques chinoises comme Xpeng et BYD adoptent une approche similaire, plaçant le logiciel au cœur de leur offre.
Il est intéressant de noter que General Motors a introduit la fonctionnalité OTA avant Tesla, mais celle-ci était limitée à son système de télématique OnStar. Les mises à jour proposées par les constructeurs traditionnels se contentent souvent d’ajuster le système d’infodivertissement, tandis que les marques numériques apportent des changements significatifs, allant jusqu’à améliorer l’autonomie ou la vitesse des véhicules.
L’évolution rapide des technologies embarquées
Les voitures sont équipées de microprocesseurs depuis les années 1970, mais jusqu’à récemment, les marques traditionnelles ont conçu leurs véhicules avec des logiciels destinés à rester inchangés pendant toute la durée de vie de la voiture, souvent de 20 ans. Selon des estimations de McKinsey, la complexité des plateformes logicielles des véhicules a augmenté d’environ 40 % par an depuis 2021. Aujourd’hui, on estime qu’il y a 69 millions de véhicules capables de recevoir des mises à jour OTA aux États-Unis.
Les véhicules définis par le logiciel, ou SDV, pourraient augmenter les ventes de voitures, selon les espoirs des constructeurs. Les scores d’évaluation de la progression des SDV placent Tesla en tête, suivie de près par des fabricants chinois comme Nio et Xiaomi. En revanche, des marques comme Nissan, Toyota et Jaguar Land Rover peinent à suivre le rythme.
Économie des mises à jour OTA
Lorsqu’elles sont bien exécutées, les mises à jour OTA non seulement améliorent l’expérience utilisateur, mais elles peuvent également réduire le coût des rappels pour les fabricants. En 2024, plus de 13 millions de véhicules ont été rappelés en raison de problèmes liés au logiciel, une augmentation de 35 % par rapport à l’année précédente. Avant l’ère des mises à jour OTA, le coût moyen d’un rappel s’élevait à environ 500 € par véhicule.
Cependant, ces mises à jour ne sont pas sans coût, tant pour l’environnement que pour les constructeurs. Harman Automotive, un fournisseur de logiciels OTA, estime qu’il en coûte environ 66,50 € à un constructeur pour livrer une mise à jour de 1 Go.
Les constructeurs numériques sont généralement les seuls à envoyer des fichiers de mise à jour volumineux, car seuls eux sont capables de mises à jour de firmware over-the-air (FOTA) qui peuvent modifier des aspects critiques tels que la gestion de l’énergie ou les systèmes de freinage. Ces capacités nécessitent une connectivité solide et une puissance de calcul significative.
Monétisation des fonctionnalités avancées
Face à la baisse des revenus, les constructeurs automobiles cherchent à tirer parti des abonnements activés par les mises à jour OTA. Par exemple, un abonnement pourrait permettre de débloquer des fonctionnalités telles qu’une amélioration de performance pour un coût supplémentaire. Ces services peuvent inclure des fonctionnalités variées, allant de la connectivité premium à des options de conduite autonome.
Un avenir incertain
Alors que l’industrie automobile continue d’évoluer vers une plus grande numérisation, il reste à voir comment les constructeurs traditionnels s’adapteront aux attentes croissantes des consommateurs en matière de mises à jour logicielles. La capacité à innover et à offrir des fonctionnalités via OTA pourrait bien devenir un facteur déterminant dans la compétitivité des marques sur le marché.
Les défis à surmonter sont nombreux, mais l’importance croissante des mises à jour logicielles pour l’expérience client et la gestion des coûts de rappel ne peut être ignorée. Les marques qui parviendront à maîtriser cette technologie auront une longueur d’avance sur leurs concurrents, alors que d’autres risquent de se retrouver à la traîne dans un monde automobile en constante évolution.



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